Cargo ship is sailing to sea to transport cargo in containers.Lo

J.L Malaussena

Docteur d'État ES Sciences Économiques

J.L Malaussena de Perno

CRISE SANITAIRE: LA MONDIALISATION A L’EPREUVE DU RISQUE

La crise sanitaire met aujourd’hui brutalement en cause la mondialisation, non sur la base de principes fondamentaux comme le fait l’article précédent, mais par l’émergence d’un point secondaire mais plus sensible: Le risque que fait courir une intégration excessive de l’économie mondiale aux approvisionnements d’un pays en cas de rupture, pour une raison quelconque, de ses relations commerciales internationales. C’est en tous cas l’occasion pour MM.Macron et Lemaire de découvrir le problème. Cet angle d’attaque ramène néanmoins aux questions fondamentales.
Si l’on admet par postulat qu’un Etat doit assurer à tout moment à sa population:

-La sécurité des ressources alimentaires, comme L’Angleterre l’avait compris au lendemain de la 2de guerre mondiale,
-La sécurité des approvisionnements des autres branches d’activités essentielles à la survie, notamment dans le domaine des industries de base.
-Un système de santé capable de faire face à un choc épidémique par des capacités hospitalières excédentaires et l’offre des médicaments nécessaires
-La sécurité intérieure et extérieure;
Cet Etat doit prévoir ce qui pourrait menacer ces exigences, et pour cela mettre en oeuvre le principes suivant: Ne jamais abandonner sans discernement les conditions nécessaires à sa survie aux lois du marché. Non seulement certains marchés n’existent pas, mais nombre d’entre eux présentent des défaillances diverses, notamment en matière de concurrence et de prise en compte du risque. C’est là le fondement même de
l’intervention publique. De la sorte:

– Si la sécurité extérieure semble bien assurée en France par la dissuasion nucléaire, c’est sans doute que dans ce domaine, l’offre ne saurait provenir d’un marché qui n’existe pas.
– De même, aucun pays ne devrait mettre en cause par des accords internationaux l’équilibre économique et social de son agriculture et de son élevage; L’auto-suffisance alimentaire est un objectif premier; De plus, sa satisfaction s’accompagne d’avantages environnementaux et sanitaires.
– La substitution du principe du mieux disant économique et social à celui d’un taux de change d’équilibre se traduit généralement par des délocalisations excessives d’activités et de pertes de compétences; Elles s’accompagnent de coûts sociaux considérables ignorés du marché. Par exemple, lorsqu’il est impossible de compenser par les mouvements du change des différences trop importantes de salaires entre pays inégalement développés, le libéralisme est parfaitement en mesure de justifier un protectionnisme raisonnable.
-Les coûts sociaux et les risques qu’il convient de couvrir pour assurer les conditions nécessaires à la survie d’une nation exigent donc de résister aux récriminations invoquant les manquements au libre échange. Le libre échange n’a de légitimité et ne comporte d’avantages que dans le cadre du libéralisme économique; Il n’en a aucun dans celui du mercantilisme. Il est donc urgent de faire comprendre que libre échange et libéralisme ne coïncident qu’à certaines conditions ignorées de la mondialisation, mais aussi du marché intérieur européen.
-Si ces obligations incombent essentiellement à l’Etat, les entreprises elles mêmes semblent découvrir à leurs dépens les inconvénients d’une dépendance trop grande à des approvisionnements lointains. La production à flux tendus se révèle déjà problématique entre deux pays voisins comme l’Italie et la France. Par ses enseignements, cette crise sanitaire est peut-être à la veille d’induire les Etats et les entreprises à des changements stratégiques importants et nécessaires.
La mondialisation actuelle est bâtie sur les hypothèse d’un marché et d’une connaissance parfaits ignorant le risque. Elles peuvent se justifier dans le cadre d’analyses abstraites raisonnant « toutes choses égales d’ailleurs », Les retenir pour la vie réelle est cependant abusif et résulte sans doute, comme on l’a avancé dans l’article précédent, de la conjonction d’une doctrine hostile par principe à l’Etat, et d’intérêts politiques et financiers aussi puissants que bien camouflés. Cela s’est traduit par la substitution du libre échange au libéralisme comme principe directeur de l’organisation de l’économie internationale, et par l’état de guerre économique mercantiliste que l’on tente de légitimer par le vocable d’« ultra-libéralisme ». Cette idéologie et ces intérêts trouvent leur sanction dans les crises multiformes qu’ils engendrent, et dans la réponse auxquelles les banques centrales sont condamnées dans l’immédiat. Reste à savoir si la création monétaire débridée à laquelle elles sont contraintes et l’accumulation des dettes dans le monde n’hypothèquent pas gravement l’avenir.

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